EDITO DU CLAPOTIS N° 66
Le village de mon enfance, celui qui prenait le temps de vivre sans se presser, le temps de dire sans se vanter, le temps de rire sans se moquer, ce village là ne se conjugue plus qu’au temps passé.
Devant la porte, près de cet anneau témoin d’un temps oublié, là où les paysans attachaient leur cheval, avant d’aller se jeter un « pot de gros rouge », une voiture passe indifférente, roulant plein pot vers un nulle part indifférent… Là où se posaient sueur animalière, crottins et coléoptères, j’aperçois quelque tache d’huile, sans doute de la « 15/40 » noircie de sueur pétrolière, les mouches ont changé d’âne, les géraniums n’en veulent plus.
Les rideaux ne se soulèvent plus quand la rue s’anime, «ça passe trop vite ». La commère a le dos tourné, elle a dorénavant un grand écran, telle est la réalité.
Depuis quelques mois, pleins d’émoi, les poteaux se sont couchés, les lignes se sont cachées, les oiseaux devenus banlieusards, filent ailleurs, les rues changent de trottoirs, le bourg tourne la page.
Le temps a changé d’époque, il avance ventre à terre et renverse les rêveurs égarés, il court hirsute à la recherche de nouvelles valeurs.
Si si, elles existent, à nous de les cultiver.
Maurice .BEYSSAC